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Les enfants difficiles et la normalisation

GÉNÉRATION ENFANTS “DIFFICILES”?
On n’accuse plus aujourd’hui les enfants d’être “méchants” lorsqu’ils manifestent des comportements déviants. On parle plus souvent d’enfants “difficiles”. Il n’est pas un jour qui passe sans qu’un parent ou un éducateur se demande ce qu’il peut faire pour aider ces enfants “difficiles” à se comporter de façon “normale”. 
Les agendas des psychologues sont remplis. Les médecins sont sollicités pour apporter des aides ou parfois des solutions.
Pourtant, les enfants ne vont plus au coin. Ils sont souvent bien habillés. Ils bénéficient de quantité de jouets. Ils mangent à leur faim. Ils bénéficient de jolies infrastructures sportives pour se dépenser le mercredi. Mais, tout cela ne semble pas suffisant pour résoudre les comportements déviants des enfants “difficiles”.
Le rapport que l’enfant entretient avec la société est certainement complexe. L’école tient une place considérable dans la vie de l’enfant. Et les structures familiales offrent  aujourd’hui les modèles les plus divers. L’analyse du phénomène des enfants “difficiles” est donc complexe. Ce ne peut être l’objet de cet article.
On peut constater un intérêt certain pour les ouvrages concernant l’éducation. Bon nombre de ces ouvrages sont souvent intéressants. Ils permettent d’améliorer la communication et les relations entre parents et enfants. Mais, les comportements déviants demeurent souvent… et la normalisation semble être un but auquel il vaut mieux ne plus penser… Alors où se situe le hiatus? Que nous manque-t-il pour accompagner le développement harmonieux de l’enfant? Le psychisme de l’enfant serait-il définitivement contaminé par une énergie chaotique?

QU’EST CE LA NORMALISATION DE L’ENFANT?
Les objectifs que chacun reconnaît à l’éducation dépendent de la vision qu’il se fait de l’homme et de son développement. Les définitions de la normalisation peuvent donc varier à l’infini. Pour obtenir une définition scientifique, il faut partir de l’expérience. C’est en observant des enfants dont les défauts classiques avaient disparus (colère, paraisse, dispersion, insolence, désordre, ennui, etc) que Maria Montessori a extrait les caractéristiques comportementales et psychiques de l’enfant normalisé.

A son époque, Maria Montessori fait le bilan suivant dans une conférence intitulée “l’enfant au travail” donnée le 11 décembre 1936: “Or, dans les familles et dans les autres écoles, on avait, de toutes les façons essayer de les corriger: en vain. Et il y eut une époque ou nos écoles s’emplirent de ces enfants difficiles. Que de mères ont essayé de corriger leurs enfants par la sévérité; d’autres, par la douceur et la patience. Et pourtant, tout était inefficace. On ne  touchait pas le point crucial. En effet, traité par la violence, l’enfant récidivait et, souvent, la douceur augmentait ses caprices. Il fut vraiment impressionnant de constater que, dans une seule condition, la guérison se produisait: lorsque l’enfant entrait en rapport avec la réalité et commençait à agir par lui-même; et cela, dans une seule forme: dans le travail et l’application. (…) Il est curieux de constater que tous les défauts disparaissent avec la normalisation“.

Lorsque Maria Montessori parle de rapport à la réalité il faut comprendre que la normalisation survient lorsque l’enfant peut évoluer dans un environnement qui lui permet de répondre à tous ses besoins psychiques. L’épanouissement survient invariablement lorsque l’enfant peut puiser dans l’environnement ce dont il a besoin pour construire l’homme en devenir qu’il est. Pour Maria Montessori, tous les défauts que l’on attribue généralement aux enfants disparaissent par le travail concentré. Il s’agit en l’espèce d’un travail qui se fait à l’aide d’un matériel particulier, lequel répond spécifiquement aux différentes étapes du développement sensoriel et psychique de l’enfant. Soutenu par un matériel qui le passionne, l’enfant trouve au contact du travail le repos intérieur qui lui permet d’orienter l’ensemble de ses énergies.
Les enfants “difficiles” ne sont donc pas une fatalité. La voie de la normalisation leur est ouverte. Il s’agit cependant de bien connaître les différentes étapes du développement de l’enfant et de lui offrir un environnement adapté qui lui permette librement de nourrir ses aspirations les plus profondes. La discipline et la paix intérieure sont les fruits psychiques que l’enfant peut recueillir au contact d’un environnement adapté à ses besoins.
Un des plus célèbres biographe et disciple de Maria Montessori, E.M Standing récapitule ainsi les traits caractéristiques de l’enfant normalisé: l’amour du travail, la concentration intense et spontanée, la capacité de choisir, la discipline, le sens de l’initiative, le travail personnel, la joie et l’amour des autres.

CONCENTRATION ET NORMALISATION
 C’est là certainement l’une des grandes découvertes de Maria Montessori. Ce fut pour elle une énorme surprise de voir qu’en libérant l’énergie des enfants dans un environnement adapté, tous leurs défauts majeurs disparaissaient. Or, Maria Montessori commença à travailler avec des enfants “difficiles”. Sa découverte est donc fondamentale. Avant de pouvoir expérimenter le développement homogène de l’enfant, elle a  d’abord observé des enfants déviants qui, en réorientant leurs énergies, ont retrouvé le chemin de la normalité. Son témoignage est donc essentiel pour resituer toute la portée de sa découverte. 

Dans une conférence donnée à Londres en 1946 intitulée “La concentration et l’éducateur“, elle nous livre la clé de la normalisation. C’est grâce à la concentration que l’enfant parvient à la normalisation. En expérimentant cette force psychique l’enfant se trouve parfaitement satisfait. Son calme surgit soudainement. Sa capacité de travail devient régulière et puissante. Son rapport à l’environnement est bienveillant. ” La normalité se trouve dans un environnement qui permet son développement naturel“. Sa découverte donnera alors toute son orientation à sa pédagogie et définira la praxis de l’éducateur. “Le travail de l’éducateur est de conduire les enfants à la normalisation via la concentrationL’éducateur a deux missions: conduire les enfants à la concentration et accompagner leur développement. L’aide la plus importante que l’adulte puisse apporter à l’enfant de trois ans est la non-intervention. L’intervention entrave la concentration et l’activité. Mais n’appliquez pas cette règle tant que les enfants portent toujours le poids de leur déviation“.

Ce point est fondamental. Le contexte social actuel est certainement différent de celui qu’à connu Maria Montessori. Mais les enfants restent les mêmes. Et la normalité est inscrite dans leur nature. Il faut simplement les aider à la découvrir. Les enfants vivent aujourd’hui dans des situations très différentes les unes des autres. Pour accompagner le retour à la normalité, il n’y a certainement pas qu’une méthode possible. A son époque Maria Montessori recommandait de ne pas punir ou gronder les enfants déviants car cela ne supprime pas ces mauvaises racines. Elle insistait pour que ces enfants puissent s’occuper avec une activité qui  les intéresse vraiment et qui les conduise à la concentration. Pour cela, il faut que l’éducateur soit capable de la reconnaître. Car, ce sera le signal d’un retour possible et progressif à la normalité. ” Au début des études de biologie on doit observer des choses au microscope, mais aussi longtemps que les yeux n’ont pas suffisamment travaillé, ils ne peuvent rien reconnaître. Ainsi doivent aussi s’exercer les yeux de l’éducateur. Il doit développer une sensibilité afin de pouvoir reconnaître ce phénomène fugitif quand il survient“. 

Une fois que l’éducateur a pu remarquer ce phénomène de la concentration chez l’enfant, il lui sera beaucoup plus aisé de lui proposer des activités qui l’intensifieront petit à petit. Cela demandera sans aucun doute de la patience et du temps. Il est probable que les écoles d’aujourd’hui ne peuvent pas résoudre ce problème. Il est donc nécessaire que les enfants puisse découvrir chez eux cette formidable capacité qui les mènera vers la normalisation. En fonction des déviations, plus ou moins de temps sera nécessaire. Mais sans le développement de cette faculté psychique, l’enfant restera toujours en difficulté. Je la trouve aussi rassurante et perspicace lorsqu’elle relativise les comportements compétitifs et agressifs des enfants non normalisés: “Même si les compétitions sont à ce stade nécessaires, ne craignez pas d’en avoir besoin. Tout cela n’ajoute rien tant que les enfants sont encore déviants; tout cela change de soi-même quand survient la concentration“.

Pour avoir eu l’opportunité de travailler avec des enfants non normalisés, je peux simplement confirmer l’expérience de Maria Montessori. Le signal d’un changement profond, c’est la concentration. Et, son absence est bien aujourd’hui l’un des obstacles au bon développement des enfants. Il ne s’agit que d’une piste de réflexion. Car, il n’y a pas non plus de solution uniforme pour aider les enfants “difficiles”. Mais, il est important de s’assurer de l’objectif poursuivi afin de pouvoir les accompagner le mieux possible.

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